Le Triangle de Gonesse se situe dans le bassin économique du « Grand Roissy » (600 000 habitants), avec un « Coeur de pôle » englobant Gonesse et une « aire directe » couvrant l’agglomération Territoires d’envol (93) et le bassin de Sarcelles (95).
Quantitativement, le territoire compte, à 5% près, autant d’actifs (270000) que d’emplois (256000).
Pourtant, les inégalités sont considérables, avec un taux d’emploi à Roissy 123 fois plus élevé qu’à Sevran (43 contre 0,35). De plus, l’inadéquation est forte entre des emplois ultra-spécialisés ou relativement qualifiés sur quelques filières, et une main-d’oeuvre locale polyvalente peu ou pas qualifiée à 46%.
D’où les chassés-croisés de travailleurs quittant le territoire pour subir des temps de transports importants, tandis que des actifs extérieurs viennent occuper un grand nombre d’emplois du territoire. A Gonesse, pourtant excédentaire en emplois (14.881 pour 10.310 travailleurs occupés), moins d’un poste sur 5 est occupé par un habitant de la commune. Et de 1999 à 2013, les 3.236 emplois implantés sur la commune n’ont profité qu’à 126 habitants supplémentaires, soit un taux d’utilité de 4%.
Pôles d’emplois et pôles de main-d’oeuvre du Grand Roissy. En brun les pôles de main d’oeuvre, en noir les pôles d’emploi… source : Jacqueline Lorthiois
Comme le montre cette carte, les pôles d’emploi et les pôles de main d’oeuvre sont la plupart du temps dissociés, éloignés, et séparés par de grandes infrastructures de transport qui fragmentent le territoire… Mais cet « éloignement » est redoublé par le fait que les emplois proposés ne correspondent pas aux attentes et aux qualifications des bassins d’emploi du territoire.
D’après l’étude ECODEV sur les familles professionnelles du territoire, plus de la moitié des emplois du coeur de pôle (53% contre 27% en IDF) se concentre sur deux filières : le transport-logistique (53.000 postes) — auquel il convient d’ajouter l’activité adjacente de commerce de gros (9.000) — et la gestion (19.000 emplois en comptabilité, finances, administration des entreprises). L’industrie — y compris le bâtiment — ne dépasse pas 9%.
A l’inverse, les activités de l’aire directe sont liées aux besoins d’une population (440.000 habitants), qui explique l’importance de 48.000 emplois « présentiels » (44% du total) répartis entre les services de proximité (10.600), l’administration publique (10.200), le sanitaire et social (9.500), l’éducation-formation (9.000) et la distribution (8.800). L’industrie est mieux représentée (15%) avec 8.200 postes dans le BTP et 8.500 dans les autres branches.
Prétendre que tous ces emplois sont liés à la présence de l’aéroport est absurde. Les seuls points communs avec la structure économique du pôle de Roissy sont l’importance des filières transport-logistique (13.300 emplois) et du commerce de gros (3.800) soit 16% ; et la pénurie de postes en conception-recherche et prestations intellectuelles, qui est une des caractéristiques d’ensemble du territoire, avec 5% des emplois du coeur de pôle et 4% de l’aire directe.
Depuis longtemps, la pléthore des activités de logistique/commerce de gros sur le territoire du Grand Roissy a généré des difficultés de recrutement local et mis des métiers en tension. De même en ce qui concerne le commerce en grande surface. A l’inverse, on enregistre une pénurie d’activités industrielles, ce qui oblige la population ouvrière à travailler au loin. Résultat : la main-d’oeuvre locale est obligée de subir d’importants déplacements journaliers. Elle est remplacée par des actifs extérieurs qui viennent occuper les postes en tension du territoire. Cette dissociation occasionne des flux supplémentaires qui peuvent atteindre 80% du nombre d’emplois : c’est le cas à Gonesse, avec des conséquences en termes de pollution, de saturation des réseaux de transports, de temps perdu et de surcoûts.
La filière professionnelle agricole est très faiblement représentée sur l’ensemble du bassin, avec seulement 330 emplois (0,13%), d’où l’intérêt de développer ce champ d’activité, qui permettra de diversifier une structure économique trop spécialisée et de recruter sur place, afin de répondre aux besoins alimentaires de la population très nombreuse de l’aire directe.
Les activités de la filière agricole, non délocalisables, sont fortement génératrices d’emplois induits dans les centres-villes en matière de restauration (notamment dans les cantines scolaires et d’entreprises), d’industrie agroalimentaire de transformation, de commerce de détail, de tourisme de proximité et de transport alimentaire.